Le 13 février 2022, le peuple suisse votera sur la modification de la loi fédérale sur les droits de timbre. Le projet du Conseil fédéral et du Parlement vise à supprimer le droit d'émission dans le but de permettre aux entreprises de se procurer plus facilement des fonds propres.
Droit de timbre d'émission, de négociation et sur les primes d’assurance
Le droit d'émission est, avec le droit de négociation et le droit sur les primes d'assurance, l'un des trois droits de timbre régis par la loi fédérale sur les droits de timbre (LT) du 27 juin 1973.
- Le droit de timbre d'émission est perçu sur l'émission de documents suisses. Si une entreprise émet des parts sociales (actions, parts sociales, bons de participation ou de jouissance), la Confédération prélève le droit de timbre d’émission sur leur valeur. Le droit de timbre d'émission dû dépend de la levée de fonds propres d’une entreprise, que ce soit lors de sa création ou lors d’une augmentation de capital.
- Le droit de timbre de négociation est perçu sur le commerce de certains titres suisses et étrangers.
- Le droit de timbre sur les primes d’assurances est prélevé sur les paiements de primes pour certaines assurances.
Le montant du droit d'émission s'élève à 1% des fonds propres levés, avec une franchise d'un million de francs.
Exemple : si une entreprise émet CHF 1.5 million, elle doit s'acquitter d'un droit d'émission de CHF 5’000 sur le montant de CHF 500’000 dépassant la limite de la franchise.
Outre cette franchise, les dispositions légales relatives au droit de timbre d'émission prévoient diverses exceptions. Sous certaines conditions, les entreprises d'utilité publique, telles que les coopératives d’habitation, sont notamment exonérées de cet impôt.
Importance économique du droit de timbre d'émission
En 2020, selon les données de l'Administration fédérale des contributions (AFC), environ 2’300 entreprises ont payé le droit de timbre d'émission. Comme certaines de ces entreprises ont levé des fonds propres à plusieurs reprises, il y a eu au total plus de 2’500 transactions. Un total de 2.2% des transactions a alors généré 51.5%des recettes fiscales, tandis que les autres 48.5% des recettes fiscales ont été générées par les 97.8% des transactions.
Selon l'AFC, les recettes du droit de timbre d'émission varient fortement, sans qu'une tendance claire à la hausse ou à la baisse ne se dégage. Au cours des vingt dernières années, la valeur la plus basse a été de CHF 120 millions (2005) et la valeur la plus élevée de CHF 407 millions de francs. En moyenne, les recettes se sont élevées à environ CHF 250 millions.
Référendum lancé contre le projet du Conseil fédéral et du Parlement
La modification de la LT proposée a pour but de supprimer le droit de timbre d'émission. Par conséquent, à l’avenir, les entreprises pourraient lever des fonds propres sans devoir payer d'impôts sur ceux-ci. Le Conseil national s'est prononcé en faveur de la modification par 120 voix pour, 70 voix contre et 5 abstentions. Au Conseil des États, le texte de loi révisé a été adopté par 29 voix pour, 14 voix contre et une abstention. Un référendum a été lancé contre le projet du Conseil fédéral et du Parlement.
Arguments pour
Les partisans de la modification proposée espèrent que la suppression du droit de timbre d'émission aura des effets positifs sur l'ensemble de l'économie, l'attractivité de la place économique ainsi que sur les emplois.
- Garantir des emplois : Le Conseil fédéral et le Parlement font valoir que le droit de timbre d'émission freine la croissance économique suisse en rendant les investissements plus couteux. La suppression du droit d’émission favoriserait les développements positifs des entreprises et permettrait de créer et de préserver ainsi des emplois.
- Peu répandu au niveau international : Le droit de timbre d'émission est une charge peu répandue au niveau international. Outre la Suisse et le Liechtenstein, seules la Grèce et l'Espagne connaissent un droit comparable en Europe.
- Éviter les charges en temps de crise : Une charge accrue pour l'économie suisse en situation de crise est également évoquée. En période de difficultés économiques, les entreprises ont régulièrement besoin de plus de capital. Le droit de timbre d'émission représente une charge supplémentaire dans ces périodes déjà difficiles.
- Réduire le risque d'endettement : Étant donné que l'emprunt de capitaux, par exemple sous forme de prêts, n'est pas imposé, les entreprises sont incitées, dans le cadre de la législation actuelle, à financer leurs activités à l'aide de crédits. L'abolition du droit de timbre d'émission promet en contrepartie de réduire le risque d'endettement.
- Ne pas pénaliser les jeunes entreprises : Contrairement aux entreprises établies, qui peuvent régulièrement financer leurs investissements à l'aide des bénéfices non distribués, les jeunes entreprises sont particulièrement dépendantes de la levée de fonds propres. Ce désavantage disparaîtra en cas d'acceptation du projet.
- Le droit de timbre d'émission est inéquitable : Étant donné que le droit de timbre d'émission s'applique indépendamment du fait qu'un investissement s'avère rentable ou non et que la capacité économique n'est donc pas prise en compte, la réglementation actuelle est souvent perçue comme inéquitable.
- Équilibrer les nouvelles règles internationales : Enfin, les partisans du projet font valoir que l'OCDE pourrait prochainement décider d'un impôt minimum valable au niveau international pour les entreprises. Dans ce cas, la Suisse risque de perdre son avantage en raison d'un faible impôt sur les bénéfices. La suppression du droit de timbre d'émission pourrait contrecarrer cette perte.
Arguments contre
Le comité référendaire estime que le nouveau projet de loi créera un trou dans les caisses de l'État. De plus, il critique le fait que ce sont principalement les grands groupes financiers, les banques et les assurances qui profiteraient de cette modification.
- Déficit dans les caisses de l'État : Les opposants au projet soumis à votation craignent que la baisse attendue des recettes fiscales de CHF 250 millions n'entraîne des réductions de prestations ou ne doive être compensée par une augmentation de l'imposition des personnes privées.
- Privilégier le secteur financier : La suppression du droit de timbre d'émission favoriserait encore une fois les grands groupes déjà privilégiés, notamment ceux du secteur financier.
- Aucun avantage pour les jeunes entreprises : Contrairement aux explications du Conseil fédéral et du Parlement, le projet n'encouragerait guère les investissements. En 2020, avec la suppression prévue, seuls 55 grands groupes auraient bénéficié de plus de 50% des nouveaux privilèges. En revanche, les start-ups et les PME, importantes pour l'économie suisse, n'auraient rien à gagner de ces changements.
Source: Explications du Conseil fédéral relatives à la votation populaire du 13 février 2022, Modification de la loi fédérale sur les droits de timbre, p. 36 ss. (livret de vote)
Findea vous aide à suivre à tout moment la situation patrimoniale de votre entreprise.